« L’épris de la lettre »
Recension de Vox par Vox de Maximilien Vox par Fabrice Colin dans Le Canard enchaîné.
Un bouquin, c'est un auteur... et c'est plein d'autres choses. Frère du naturaliste Théodore Monod, Maximilien Vox (1894-1974) toucha à tout, passant, "tour à tour ou simultanément, par le métier de graveur sur bois, d'illustrateur de livres, de typographe autodidacte, d'employé de fabrication, de journaliste et d'écrivain, voire d'éditeur clandestin".
On lui doit, entre autres, le logo des polars du Masque, les lettrines du Grand Larousse, le monogramme de la SNCF, une classification typographique qui fit autorité pendant six décennies et des ouvrages sur Napoléon.
Ces Mémoires inédits, enrichis d'une abondante iconographie et de textes de référence, révèlent un esprit curieux de tout - goguenard et virevoltant, humble mais conscient de sa valeur.
S'il côtoya Picasso et Cocteau, s'il fut le "camarade de Giraudoux, Morand, Montherlant, Mauriac", Vox mentionne surtout les amis vrais, "ces points d'appui, ces foyers rayonnants que forme, invisible, la chaîne permanente des gourous de tous les temps" : l'éditeur Bernard Grasset ("dictatorial et génial"), l'illustrateur Paul Iribe - son maître, "l'inventeur du dessin de mode" - et son cher Jean Giono, avec qui, entre autres, il fonda en 1952 les Rencontres de Lure en Provence, où chaque année encore, se réunissent les amoureux de la chose écrite.
Une vie comme un roman, donc, avec notes de bas de page et caractères flamboyants. En 1943, alors que Vox, pourtant "ouvertement hostile au régime hitlérien", a rejoint le sinistre ministère de l'information "pour être sur place, à côté des bureaux de la censure", un ami résistant débarque chez lui, évoque une revue clandestine à laquelle il faut un chef. Pas le temps d'ergoter, "on va t'intégrer dans le groupe Combat : c'est tout à fait ton boulot", annonce le tempétueux compère. "Vive la France !", et Vox se réveille.
Plus tard, il participera à la Libération de Paris... avant de retourner à ses chers alphabets. "L'âge de l'imprimé touche à sa fin", écrit-il dès 1935, comme s'il avait pressenti l'ère des pixels, "j'ai conscience d'appartenir à une espèce appelée à disparaître".
Allons, il est encore un peu tôt pour jeter l'encre...
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