Depuis sa rencontre, dès le lycée, avec les écrits d'André Breton - "le surréalisme avait pour moi le mérite de poser la seule question qui vaille : comment vivre ?" -, Annie Le Brun n'a cessé de porter une révolte existentielle contre "l'ordre de la rationalité et du profit". Face à une civilisation technicienne qui massifie les esprits et nous dépersonnalise, en nous enfermant dans un univers de marchandises et d'images "qui exclut toute négativité", elle défendait la sensibilité propre à ce "rêveur définitif" qu'est l'homme. Avec "ses désirs, son inconscient, sa sexualité", sa poésie, son imagination, son corps, ses passions, sa subjectivité... Le recueil L'insistant désir de voir s'élargir l'horizon, regroupant cinq interviews et une conférence, permet de mieux comprendre le parcours d'Annie Le Brun, son oeuvre et ses positions. Critique de l'enlaidissement industriel du monde, du néoféminisme - ce "stalinisme en jupons" -, des impostures intellectuelles de la French Theory, elle nous a aussi légué des textes brillants sur la "reconfiguration psychique" engendrée par les nouvelles technologies. Alors que "les dispositifs de décervelage n'ont jamais été aussi puissants, aussi sophistiquées, aussi perfectionnés que dans le monde numérique en train de ses substituer à nos vies", Annie Le Brun invitait à la désertion. Du sensible, sinon j'étouffe ! (...).

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