« Combats pour l’enchantement »
Recension de Passages de Georges Navel par Ernest London dans Le Monde Diplomatique.
Georges Navel (1904-1993), dernier des treize enfants d’un couple de paysans de Pont-à-Mousson devenus ouvriers, puisa dans sa vie et ses souvenirs la matière première de ses écrits. Il eut une existence peu caractéristique des littérateurs : manœuvre, ouvrier, correcteur d’imprimerie, syndicaliste, proche du communisme libertaire, autodidacte… Remodelés, plus ou moins dépouillés ou développés, pris dans un questionnement ou une sensibilité qui bouge au gré des expériences, ses écrits renferment des épisodes communs, et des singuliers.
Travaux, paru en 1945, lui a valu une certaine renommée. Avec Parcours (1), publié en 1950, il retrace les principales étapes de sa vie, depuis son enfance, en Lorraine, près du front pendant la première guerre mondiale. Un certain nombre de récits s’interrompent brutalement, et laissent souvent le lecteur sur sa faim. Avant tout se relatent un cheminement, des prises de conscience (anticléricales, antimilitaristes, sociales) et des engagements, sans rien cacher de ses doutes ou de ses contradictions.
Dans Passages (2), consacré à son enfance et à sa jeunesse, paru en 1982, il s’attarde davantage. Trente-cinq pages évoquent son premier séjour en Algérie — où il fut évacué à 12 ans par la Croix-Rouge. Avec cet ultime ouvrage, il déroule et entremêle ses thématiques fétiches, ferment de ses réflexions : la famille, l’école, la guerre, le travail et l’usine, l’évasion de « ce monde d’esclaves » et les rêves de « grand soir ». Il rapporte avec minutie les moments, les échanges, les lectures et les rencontres qui ont nourri sa révolte, en même temps que ses interrogations (...).
Pour lire la suite : www.monde-diplomatique.fr/2025/05/LONDON/68392