« 10 rue Dombasle »
Recension de Parias de Marina Touilliez dans L'Histoire.
Certes, Hannah Arendt est au centre de ce livre, mais entourée des membres de sa « tribu », ceux qui, comme elle, furent obligés de fuir l'Allemagne nazie car juifs ou opposants, souvent les deux. Si l'histoire de Walter Benjamin – son suicide à Port Bou, la perte de son dernier manuscrit – et celle d'Arthur Koestler – l'auteur de La lie de la terre – sont connues, Marina Touilliez tire de l'ombre d'autres figures : Erich et Herta Cohn-Bendit, Lotte Sempelt, Fritz Fränkel ou le communiste Heinrich Blücher qui deviendra le mari d'Hannah Arendt. Entre tracasseries administratives et extrême pauvreté, ces « indésirables » vivent en groupe, s'entraidant, s'aimant, se disputant. Ainsi, ils logent presque tous dans le même immeuble, au 10 rue Dombasle. La déclaration de guerre sonne l'heure de la persécution et de la dispersion, celle de l'internement dans divers camps, de la fuite, de l'immigration pour certains, de la clandestinité pour d'autres.
Du fait de son style et de sa construction, une étrange magie sourd du livre de Marina Touilliez. Il répond aux critères de l'écriture de l'histoire, explorant toutes les sources possibles, archives et témoignages. Mais les portraits, la narration qui met en scène ces originaux si attachants en fait un bonheur de lecture. Dans le grand malheur des temps des années 1933-1941, ces hommes et ces femmes firent preuve d'une si grande vitalité – intellectuelle notamment – et d'une solidarité sans faille. Ces parias, réfugiés, dont la terre se déroba sous leur pied puisèrent leur force dans les liens qui les unissaient. « L'amitié est la seule patrie qui vaille », écrivait Hannah Arendt. Un réconfort pour le lecteur d'aujourd'hui (...).
Pour lire la suite : www.lhistoire.fr/livres/10-rue-dombasle