06/09/25

« Une vie consacrée aux livres »

Recension de Plein Chant d'Edmond Thomas par Francis Pian dans Le Monde Libertaire.

Une rencontre, un groupe de trentenaires, un éditeur de labeur, Edmond Thomas. Ces livres imprimés par ses soins, vous les avez déjà vus sur les présentoirs des librairies, à Publico bien sûr ou ailleurs. Les éditions Plein chant, c’est lui ! 500 livres publiés grâce à une imprimerie et une maison d’édition. Dans sa collection Le peuple du livre, Les éditions l’Echappée se devaient de publier les échanges, les souvenirs évoqués lors de cette rencontre dans Plein chant, histoire d’un éditeur de labeur. En quatrième de couverture, ce constat : « Des auteurs prolétariens dédaignés, des graveurs méconnus, de petits poètes signant de grands poèmes, soit autant de destins littéraires et artistiques oubliés demandant à l’être un peu moins ». Voici cinquante ans que l’aventure Plein chant est engagée. Chacun, un livre en main, peut apprécier la qualité de fabrication, la cohérence du catalogue, le choix des auteurs. Rien ne prédestinait Edmond Thomas à créer Plein chant, sinon une passion pour le livre, l’écrit, sa sensibilité envers le destin des gens du peuple.

Comme à l’accoutumée dans cette collection, le lecteur pourra apprécier la qualité de la mise en page et les illustrations toutes issues des livres de Plein chant. Des linogravures de Pascale Hémery, des eaux fortes de Martial Potémont, des photos des amis, les culs de lampe, les bandeaux de Gilles Chapacou scandent les pages de cet ouvrage. Edmond Thomas, un petit gars de Paris, du 15ème arrondissement, les noms des rues, des places, le square Saint-Lambert me sont familiers. Coup de chance, il entre comme arpète chez Brodard et Taupin, une époque où le 15ème accueillait encore des entreprises. Il découvre Prévert grâce à Paroles, puis Henry Poulaille. De très belles pages sur Poulaille. Le virus de la lecture ne le quittera plus. Il passe grouillot chez Armand Colin. La vie des maisons d’éditions, celle des ateliers, passionnante, les souvenirs s’entrechoquent parfois mais cela rend encore plus vivantes les pages. C’est le temps des grandes librairies du Quartier latin, Corti, La Joie de lire de Maspero qui éditera son premier ouvrage Voix d’en bas.

La poésie, la musique du texte

Et c’est la découverte de la poésie grâce à la collection Poètes d’aujourd’hui de Seghers. Edmond Thomas se prend de passion pour cette musique du texte, le son des mots. En 1971, il part pour Bassac en Charente. Toujours la poésie avec Pierre Boujut, La Tour de feu. Il se lance dans la publication de la ronéo à l’imprimerie, il apprend sur le tas, avec des copains. L’amitié est fréquemment évoquée au fil des pages, tout comme la poésie ouvrière. Les noms se succèdent, quel magnifique florilège de la culture prolétarienne. En 1979, il lance la collection Voix d’en bas, sa première publication sera L’Ascension de Lucien Bourgeois. A lire !! Cette littérature selon Edmond Thomas montre des gens qui sortent de la débine par le travail, la volonté.

En imprimerie dans ces années 1970-2000, la technologie évolue considérablement, il faut s’adapter, là aussi les pages sont passionnantes et évocatrices pour celles et ceux qui ont connu cette période. Comme il réalise du beau travail, les commandes ne manquent pas, Edmond cite quelques éditeurs dont Claire Paulhan, dont nous saluons régulièrement la qualité des publications dans l’émission Au fil des pages sur Radio libertaire. Pour produire ce beau travail, il faut de la passion, de l’amour du livre, Edmond ne respecte pas les règles canoniques de la fabrication, mais lisez-le décrivant les caractères (Ah, le Garamond !), le travail des « gens du livre ».
Dans la dernière partie de l’ouvrage, Edmond Thomas dresse une impressionnante liste des collections, des ouvrages publiés, des auteurs, des éditeurs. Une vie fascinante évoquée avec modestie, une forme de grandeur (...).

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Edmond Thomas