24/10/22

« Séverine, libertaire et féministe, à l’encre rouge »

Recension de L'Insurgée de Séverine par Jean-Claude Leroy sur Lundimatin.

Au moins pour la trilogie qu’a laissé l’enthousiaste communard, le nom de Jules Vallès est resté dans les mémoires. Séverine lui est souvent rattachée, à raison, puisqu’elle fut effectivement amie et disciple du fondateur et directeur du Cri du peuple, journal qu’elle dirigera après son décès. Quoique méconnue d’un large public, elle suscite l’intérêt aujourd’hui, il suffit de voir pour s’en convaincre que les publications qui lui ont été consacrées dans les années passées se sont retrouvées vite épuisées. Car c’est une personnalité singulière et très entière, en sus d’une plume des plus alertes, que cette Séverine !
Anarchiste, dreyfusarde, féministe, elle fit preuve d’une belle et difficile indépendance et, à travers les milliers d’articles qu’elle a publiés, prit toujours et résolument le parti des pauvres.

Fille d’une famille petite bourgeoise, née en 1855, elle grandit dans une froide atmosphère qui se défie de l’humeur et des idées. Or, la jeune Caroline Rémy, c’est son vrai nom, est manifestement rebelle et bouillonnante. On dit qu’elle s’attache d’instinct aux victimes, aussi bien l’oisillon tombé du nid que l’enfant métisse rejetée par les autres, et qu’elle use volontiers de ses poings pour faire justice, comportement incongru dans un milieu policé par principe. Elle est encore impubère qu’on lui promet l’échafaud, ou une vie de malheur à force de mettre de la passion partout.

Elle a dix-sept ans quand son père lui impose un époux qui ne lui sied guère. La conjugalité ne dure guère qu’une année, les mariés se séparent de fait, et le bébé (Louis) est placé chez une nourrice.

Voici que Caroline travaille comme lectrice chez une bourgeoise de Neuilly dont le fils, Adrien, tombe amoureux d’elle. Si le mariage est impossible, Séverine étant encore mariée (le divorce étant alors interdit, depuis 1816, et le sera jusqu’en 1884), ils vivront tous deux leur histoire avec discrétion et sous la protection de la bienveillante belle-mère. Quand Caroline devient grosse, les voici qui partent voyager en Europe où l’inquisition sera moins pénible. Ce deuxième enfant, prénommé Roland, grandira, lui aussi, chez une nourrice, puis chez sa grand-mère. Comment saurait-elle faire preuve d’instinct maternel, « incapable de donner ce qu’elle n’a pas reçu » (...).

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