03/01/20

« Portrait réaliste et puissant »

Recension de Samedi soir, dimanche matin d'Alan Sillitoe par Frédérique Roussel dans Libération.

Arthur Seaton, 21 ans, trime toute la semaine à l'usine, à Nottingham, dans le bruit assourdissant de l'atelier de tournage. Le samedi soir est le meilleur moment de la semaine : "L'un des cinquante-deux jours de gloire dans la grande roue de l'année qui tourne si lentement, le prologue échevelé d'un morne dimanche". Bagarreur et rebelle, il s'offre avec sa paie des complets smarts, des pintes à gogo dans les pubs de la ville, et fréquente sans scrupule des femmes mariées. Menteur et querelleur, empli d'un désir de liberté, il se retrouve rattrapé par sa condition sociale, celle de l'ouvrier de l'après-guerre qui ne crève plus de faim mais qui sent sa vie se refermer comme une prison. Portrait réaliste et puissant, analyse cynique du piège capitaliste, ce premier roman culte d'Alan Sillitoe, du groupe d'écrivains des Angry Young Men dans les années 50, était épuisé depuis trente ans. "La langue ? Aussi brutale qu'un crochet dans la mâchoire, écrit Jacques Baujard dans la préface. La toile de fond ? Aussi sombre qu'une mine de charbon du Lancashire."

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