Connu pour son analyse des conséquences de la numérisation de la société, le philosophe technocritique Éric Sadin revient avec deux essais. « Penser à temps » (L’échappée) et « Désert de nous-mêmes » (L’échappée), qui nous aident à comprendre ce qu'il nomme « le tournant intellectuel et créatif de l’intelligence artificielle ».

Le 30 novembre 2022, ChatGPT est mis en ligne par l'entreprise états-unienne OpenAI. La plateforme d'intelligence artificielle générative (IAg) fascine immédiatement le grand public, comme la presse, les responsables politiques et les intellectuels. Mais avons-nous réellement pris la mesure de la révolution que représentait la prolifération d'intelligence artificielle capable de générer de manière autonome du contenu, textes, images, vidéos ou sons ? Non, répond le philosophe Éric Sadin. Critique inlassable de la numérisation de nos sociétés. Il analyse le « tournant intellectuel et créatif de l’intelligence artificielle » dans deux essais qui viennent de paraître. L'un, Penser à temps (L'échappée), est un recueil de ses meilleures interventions – entretiens et tribunes – dans la presse écrite. L'autre, Désert de nous-mêmes (L'échappée), est totalement inédit. Rencontre.

Marianne : Pour vous les IA génératives marquent « un tournant intellectuel et créatif ». En quoi ?

Éric Sadin : Le 30 novembre 2022, jour où ChatGPT a été mis à disposition du grand public, représente l’une des dates parmi les plus décisives de l'histoire de l'humanité. Pourquoi ? L'histoire récente des technologies numériques est faite de trois grandes ruptures, caractérisée par le fait qu’elles ont à chaque fois provoqué un recul de l’usage de certaines de nos capacités naturelles (...).

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