05/03/21

« Arthur Cravan, l'art du scandale »

Recension d'Arthur Cravan, la terreur des fauves, par Linda Lê dans En attendant Nadeau.

André Breton, dans son Anthologie de l’humour noir, loue la conception toute nouvelle de l’art et de la littérature qu’avait Arthur Cravan (1887-1918), pseudonyme de Fabian Lloyd, neveu d’Oscar Wilde, conception qui est celle « du lutteur forain ou du dompteur ». Rémy Ricordeau, réalisateur de plusieurs films sur des figures surréalistes (Benjamin Péret, Francis Picabia) publie un ensemble de textes et de documents autour de cette « terreur des fauves ». [...]
Le livre que consacre Rémy Ricordeau à ce « fou des fous » a la beauté d’un poème qui échappe aux règles et le ton incisif de celui qui était toujours en bisbille avec les artistes de sa connaissance. Le cœur de cet objet littéraire qui pourrait se définir comme une « romance des lutteurs » renferme les « lettres d’amour et de désertion » de celui qui avait vagabondé à travers le monde, en Allemagne, en Italie, aux États-Unis, au Mexique… Jusqu’au jour où il se procura une frêle embarcation et se perdit en mer, en novembre 1918, sans que personne sût quoi que ce fût des circonstances de sa disparition. Les lettres d’amour sont adressées à Sophie Treadwell, journalise et dramaturge, et à la poète d’avant-garde Mina Loy.
Mina Loy faisait partie du cercle où figuraient T. S. Eliot, Ezra Pound, William Carlos Williams. Elle donnait à Cravan le surnom de Colossus, à cause de sa taille impressionnante. Ils se rencontrèrent à New York. Elle était belle, incandescente, talentueuse, lui passionné, sans concession et pressé de vivre. L’année qui suivit leur rencontre, ils se marièrent à Mexico, où ils s’installèrent, Cravan pourvoyait à leur subsistance en étant professeur de boxe. Les lettres de Cravan à la poète sont exaltées. Ce qu’elles laissent entrevoir, comme l’écrit Annie Le Brun dans sa postface, c’est un horizon où la révolte se nourrit de l’amour comme de la « seule utopie réalisable, ici et maintenant ». La lecture de ces lettres électrise. Elles sont certes enflammées, mais elles ont aussi des accents de liberté et un je-ne-sais-quoi de sauvage qui enivrent.

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